La Source - Congrégation Immaculée


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L'Aventure Missionnaire : Mission II et III

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Mémoires de la Congrégation


Soeur Théodosie - supérieure générale

 

Dieu Seul !

 

Castres 5 juin 1901

Mes bien chères Mères et Sœurs,

Depuis plusieurs jours déjà vous auriez eu des nouvelles de mon voyage et de tout ce qui s'est produit d'intéressant pendant le mois écoulé, si je n'avais subi, en rentrant, une assez forte indisposition laquelle m'a tenue forcément au repos presque complet. Ce n'est pas sans peine que j'ai subi les séances successives de la semaine dernière et, pourtant, quel plaisir j'avais à voir la joie de ses chères enfants. La séance de jeudi surtout a attirée les parents en grand nombre et les amis aussi ; elle a été bien réussie et a atteint le but principal : satisfaire parents et élèves. Aujourd'hui je suis tout à fait remise ; il ne me reste plus que le souvenir des petites souffrances occasionnées par une double irritation d'entrailles et d'estomac.

            Au retour j'ai trouvé notre bonne Mère Assistante, M. Flavienne Bonhomme, alerte, pleine d'entrain, s'occupant de tout comme si elle n'eût pas été malade. Elle a pourtant à ménager ses forces et beaucoup encore ! Le mal n'a pas disparu, le teint est le même ; mais la confiance en Marie Immaculée soutient son courage et ses forces. Elle nous la communique comme elle a toujours fait durant sa maladie. Avec quel accent ému elle a traduit, mardi dernier, ses sentiments de reconnaissance et de profonde affection, sentiments qu'elle aurait voulu faire entendre à la congrégation tout entière. Vous avez chacune votre part dans ce merci aussi fraternel que filial. N'avons-nous pas senti tous les cœurs à l'unisson dans ce concert de prières et de souffrances durant ces longs mois d'angoisse ? L'union fait la force. Cet esprit de famille qui distingue toutes nos maisons et la Congrégation tout entière est ma plus grande consolation, ma plus douce espérance. Que le bon Dieu nous continue cette grâce ! -- J'ai besoin de dire ici à chacune de vous mes chères filles que vos souhaits et vos prières ont trouvé le chemin de mon cœur. Recevez mon regret de ne pouvoir vous adresser individuellement mon merci. Veuillez me faire crédit ; j'essaierai de payer mes dettes un peu tous les jours.

            Nous avons à remercier le ciel de la prospérité de nos maisons. Paris se maintient à son magnifique chiffre d'élèves et voit grandir tout modestement sa réputation par la bonne tenue, le travail, l'ordre, le bon esprit des enfants. Malgré les déceptions que fait recueillir le caractère bordelais ne nous plaignons pas il y a bon nombre d'élèves et des résultats obtenus. Le bien se fait partout grâce à Dieu. À Toulouse Saint-Hilaire où les élèves augmentent tous les ans j'ai été bien édifiée par la pieuse fête de la première communion. Combien était petite cette chapelle qui ne renfermait pourtant que les élèves objet de la cérémonie et les parents ; malgré une concurrence acharnée dans le quartier Saint-Pierre, le chiffre des élèves se maintient ce qui n'est pas mince victoire sur le démon.

Vous apprendrez toutes, avec joie et reconnaissance, mes chères sœurs, que notre malade du Gabon, Sœur Flavie Sauret a été sauvée de la mort qu'on voyait comme certaine le Vendredi Saint. Le docteur ne lui avait donné qu'un quart d'heure de vie. Quel changement s'est-il produit en elle ? Le bon Dieu seul le sait. Ce qu'il y a de certain c'est qu'elle peut rentrer en France pour se remettre. Elle est accompagnée de sœur Henriette Audiguier qui a été souffrante aussi mais non au même point. Sœur Saint Gérard Sieffert et sœur Saint Cyprien Ourliac se sont relevées de leur accès bilieux. Il est pénible de voir toujours le personnel diminué par les départs et nécessairement surchargé pendant de longs mois. -- Au Sénégal, même peine : Sœur Madeleine Coumoul ne se remettant pas de l'anémie laissée par la fièvre jaune est obligée de rentrer en France. Il est visible que le bien ne s'opère que par la souffrance. N'en perdons pas le fruit, demandons au ciel de nous sanctifier par elle.

Chacune se demande trop anxieusement peut-être que sera l'avenir que tout nous montre si noir ? Vous avez su la campagne entreprise contre la loi que le Sénat se presse fiévreusement de voter. Malgré tout, gardons notre confiance, la Providence à des secrets en réserve. Le bon Dieu aura le dernier mot soyons en sûre. Notre unique occupation doit être de rester fidèles à Jésus jusqu'au dernier soupir. A Paris je n'ai pas vu plus de préoccupations que d'habitude dans ceux qui ont des charges autrement importantes que celles de votre petite Congrégation. Ils travaillent, font le bien, espèrent et se confient en Celui qui doit nous sauver. Faisons de même. Soyons sans peur. N'ayons qu'une seule crainte celle d'offenser le bon Dieu. Redoublons de respect filial pour l'autorité, de vraie obéissance toute faite d'esprit de foi, d'humilité. Ces vertus religieuses nous sauveront mieux que toutes les précautions.

La crainte ne saisit pas toutes les âmes puisque nous avons reçu trois nouvelles postulantes et que plusieurs s'annoncent avant septembre. Nous sommes à 31 novices et 18 postulantes dont trois auxiliaires.

J'aime à penser que le mois du Sacré-Cœur se fait, dans toutes nos maisons, avec grande ferveur et piété. La première neuvaine demandée a dû se terminer le 3 et la seconde commencera le 6 pour se clôturer le jour de la fête du Sacré-Cœur. Soyons plus généreuse que jamais pour obtenir l'assistance divine. Jésus ne permet-t-Il pas la persécution pour nous exciter à prier et à nous sanctifier.

Les sœurs Bertrande Lafite et Angélique Cros ont perdu une de leurs sœurs que je recommande à vos prières.

A Dieu plus que jamais, mes chères filles, il doit être notre tout à la vie et à la mort.

Sœur Théodosie.