Aujourd'hui, nous sommes allés à 5 à Calais (Michelle, Christiane, Françoise, Marie-jo et Michel) Le Secours catholique de Calais ne pouvant mettre à notre disposition ni véhicule ni personne (mais Nicolas nous avait préparé une grosse bonbonne de thé), nous avons rempli d'eau la quarantaine de jerrycans que nous avions apportés et nous sommes partis vers le camp des migrants avec nos propres véhicules. De 10h à presque midi, nous avons distribué biscuit, eau et thé et nous sommes allés à la rencontre des migrants dans le camp. Nous avons surtout rencontré des soudanais du Darfour qui nous ont très bien accueillis, toujours avec le sourire. En deux endroits différents, ils nous ont offert des chaises et nous ont préparé du thé et du café. Tout en faisant la popote et en améliorant leurs abris, ils nous ont raconté leur histoire.
L'un d'eux qui disait avoir 22 ans (mais il nous paraissait beaucoup plus jeune !) a quitté son pays en 2011. Comme la plupart, il a traversé la Lybie ("mauvais pays !"), la méditerranée et l'Italie puis la France avant d'arriver à Calais en Juin. Depuis 4 ans, il a perdu tout contact avec sa famille qui a du se perdre en Lybie. Il est fatigué d'essayer de gagner l'Angleterre et il veut donc maintenant rester en France. Il prend des leçons de Français mais il n'y a pas assez de formateurs.
Ce récit, nous l'avons entendu souvent avec des variantes. Nous avons constaté qu'en effet, ils sont très nombreux désormais à vouloir rester en France et ils ont construit une salle de classe pour apprendre le Français mais Dominique, une bénévole du Secours Catholique ne peut venir que deux après-midi par semaine.
A midi, nous sommes entrés dans le centre Jules Ferry où nous sommes d'abord allés voir les femmes et les enfants hébergés : Nous
avons distribué des jouets, des chaussures et des vêtements pour les enfants. Après un déjeuner expédié sur le pouce, nous avons pris notre part du service des douches : presque 500 migrants ont
pu ainsi se laver et se raser. Un jeune couple de Syriens qui venait juste d'arriver à Calais a demandé à Françoise s'ils pouvaient être hébergés. Françoise est allée les présenter à l'accueil,
au permanent de la vie active mais, d'une part, seules les femmes peuvent être hébergées et, d'autre part, le centre est plein et il y a déjà 60 femmes sur la liste d'attente. Françoise et
Marie-jo ont pu constater la détresse de ce jeune couple et la grande fatigue de la jeune femme. Avant de quitter Calais, nous sommes repassés par le local du Secours Catholique où nous avons pu
discuter avec Maryam…
Elles sont aux anges. Jeanne-Émilie de Villeneuve, la fondatrice de la congrégation, sera canonisée le 17 mai. Pour l’événement, Marie-Pierre et Marie-Reine iront à Rome où elles croiseront le ministre de l’Intérieur et Michelle se rendra à Castres où a été fondée la congrégation.
Cadre infirmière à l’hôpital de Limoges, Michelle est âgée d’une vingtaine d’années lorsqu’elle souhaite devenir religieuse, mais on lui dit… "Vous n’êtes pas prête". Il faudra attendre encore un an et demi pour que les portes s’ouvrent. "je veux servir les pauvres", a posé comme règle Jeanne Émilie de Villeneuve. Alors Michelle, comme les deux autres sœurs de la communauté, s’y emploie. "Il faut aller là où la voix du pauvre nous appelle".
Installées au Mont-Liébaut depuis 1996, elles se sont intégrées en participant aux fêtes de quartier (voyages, fêtes des voisins, quartiers d’été…), en œuvrant dans les associations, en formant les laïcs à la pastorale (enterrements…), en préparant les baptêmes, en se confrontant à la misère du monde. "J’étais visiteuse de prison à Fresnes, puis à l’aumônerie de la maison d’arrêt de Béthune. À 79ans, trop âgée sur le plan administratif, je suis maintenant l’amie du dimanche pour ceux qui sont incarcérés. Avec le Secours catholique, elles aident sans discernement les plus démunis. Une fois par mois, elles se rendent à Calais pour soulager la détresse des migrants en distribuant des kits de douche, en nettoyant, en offrant le café du réconfort."Devenir missionnaires là où nous sommes, en osant prendre position pour la justice, la paix, le respect et l’attention au plus petit… dans tous nos lieux de vie, avait voulu Jeanne-Émilie de Villeneuve. Pour les sœurs du Mont-Liébaut, c’est fait.
Sœur Marie-Reine, originaire d’Oran, a quitté l’Algérie en 1957 pour se rendre à Paris afin de devenir religieuse. « Là-bas, catholiques et musulmans s’entendaient très bien et dès qu’il y avait une fête, nous étions invitées. »
Jeanne-Émilie de Villeneuve sera canonisée en même temps que trois autres religieuses. Grâce à la prière, son intervention aurait permis de sauver Émilie Maria de Souza en 2008, suite à une grave électrocution, les experts déclarant inexplicables la guérison et l’absence de séquelles, et en 1995 Binty Diaby, jeune musulmane africaine condamnée sur le plan médical.
GÉRARD BOUQUET (CLP)
Béatifiée en 2009, Sœur Émilie de Villeneuve sera canonisée à Rome dimanche 17 mai.L’aboutissement d’une procédure initiée dès 1948 et un événement exceptionnel pour la ville de Castres ou la jeune femme avait fondé sa congrégation.
Émilie de Villeneuve n’aurait peut-être pas apprécié le cérémonial et les honneurs qui vont lui être rendus à Rome et à Castres à l’occasion de sa canonisation dimanche 17 mai. Elle qui préférait œuvrer dans l’ombre et la discrétion.
Avant de fonder sa congrégation de l’Immaculée Conception (1836), plus connue sous le nom des « Sœurs Bleues », elle se lamentait sur "le concert de louanges amollissantes " qui entourait sa vie au sein d’une famille de la petite noblesse.
Au-delà de sa personnalité et des miracles, c’est son action qui est mise en valeur. Une action qui se perpétue aujourd’hui au
profit des plus pauvres et des plus démunis. Retour sur un parcours incroyable.
Karim Benaouda
Deux pages spéciales
" Elle a très vite perçu la misère ouvrière". Rencontre avec l'historien de formation, le père Claude Cugnasse, 82 ans, un fin connaisseur du parcours de Sœur Émilie de Villeneuve. Le grand périple de Sœur Barnabé. Sœur Barnabé est la seule Castraise du Couvent bleu. Du haut de ses 83 ans, elle n’a pas froid aux yeux. Pour assister à la canonisation d’Émilie de Villeneuve à Rome, elle s’installera dans le bus des voyageurs (70 pèlerins castrais en tout) pour un périple de 34 heures, aller-retour !
Les lycéens voient la vie en bleu. C’est un établissement particulier que le lycée Notre-Dame. Il partage en effet le même site que le Couvent Bleu fondé par Émilie de Villeneuve et la maison de retraite qui porte le nom son nom.
"Un événement exceptionnel pour tout le département du Tarn. » Trois questions à Monseigneur Legrez, l'archevêque du diocèse d’Albi.
200 membres de la famille à Rome. Louis de Villeneuve, qui file allègrement sur ses 70 ans, un de ses héritiers, habite toujours dans la vaste demeure, qu’il partage avec son fils, Jean-Guillaume. Le nom est bel et bien perpétué et c’est toute une famille qui va prendre le chemin de Rome ce week-end pour assister à la canonisation.
à suivre
l’Espérance est déjà là, nous en VIVONS… nous en témoignons… et voulons vous le partager…
Très bonne fête de Marie Immaculée, Marie première sauvée, Marie Mère respectueuse de chacun dans la discrétion… Marie reconnue dans l’Islam…
Marie, c’est elle qu’étaient venus RENCONTRER un groupe de migrants de Calais…..
Un rêve fou, préparé pendant plusieurs années par des salariés au service des migrants…. Donner « un espace d’être ensemble pour prier» à Lourdes à la Cité Saint Pierre du Secours Catholique.
Michelle a eu la chance d’y participer avec des bénévoles, habituellement au service des migrants, des salariés et 30 migrants de pays différents : Erythrée, Soudan, Somalie, Mali, Ukraine, Hongrie, Afganistan, Syrie, Iran, Maroc et nous de France. Nous étions aussi de religions différentes, la plupart musulmans, quelques orthodoxes, des évangélistes et des catholiques….
A la fin du séjour, Mariam l’animatrice principale nous a fait CADEAU d’un très beau "poème"?, une "belle prière" ? je ne sais. Je crois qu’elle exprime beaucoup des sentiments de tous qui n’aurions pas su le dire si bien.
Lisant ce texte aux sœurs de la Communauté en cette veille de notre fête, nous avons pensé à chacune d’entre vous : en vous faisant ce « cadeau » aujourd’hui, nous voulons rencontrer chacune…..
Avec notre fraternelle amitié, notre prière à Marie la Reine de la Paix.
Michelle Martin, Marie Pierre et Colombe Kedowidé
Deux temps durant ce merveilleux voyage m’ont marquée à jamais !
- Le premier, c’est le temps de la marche dans les Pyrénées (peuple en marche) :
Je l’ai vraiment vécu, apprécié, c’est le temps qui m’a le plus aidé à méditer et à retourner mon intérieur… La montée vers le sommet était très dure, mais me connaissant je ne voulais pas baisser les bras ou me résigner à la fatigue, cela ne faisait vraiment pas partie de ma nature.
C’était dur, plus que dur, dur de continuer, dur de suivre les autres, surtout que je ne sais ne pas faire marche arrière. Je
m’approchais de la cascade, mais c’était encore plus dur d’avancer. Michel (prêtre) m’aborda : "Mariam avance, tu es tout près, pense aux migrants qui doivent parcourir des montagnes pour
venir ici". (Michel est l’un des prêtres accompagnateurs actuellement responsable général du Prado. Ancien aumônier diocésain du
secours catholique.)
Nous étions 45 personnes et finalement seulement une dizaine de personnes ont réussi à atteindre le but. A un moment j’ai
commencé à comparer cette marche à la route que font les migrants, parfois sans eau avec la chaleur. J’ai pensé à la montagne qui mène à CEUTA , dur souvenir… je me suis dit au fond de moi,
tu ne serais pas la femme que tu es maintenant si tu n’avais pas traversé toutes ces épreuves , je retiens mes larmes… Certains parmi les migrants ont besoin de plus de temps pour arriver,
d’autres n’ont pas pu avoir une "béquille". A ce moment-là, j’ai pensé aussi à ceux qui perdent la vie sur la route de l’exode, tout cela c’est Michel qui l’a réveillé en moi. Merci
Michel.
Et là je reprends force, et je me dis : allez avancer. J’ai l’impression, tout d’un coup, que ce sont deux personne qui sont venues m’épauler, comme deux "béquilles".
Ce sont deux de mes frères, l’un a pris mon bras droit et l’autre le gauche, et en quelques minutes je suis arrivée jusqu’à la cascade. Je ne serais jamais arrivée au sommet sans l’aide de mes frères.
Le thème de cette journée je l’ai vécu pleinement : peuple en marche, un seul peuple, un seul corps, c’est ce que nous devons être dans la vie
de tous les jours, penser à l’autre, en se prenant la main ensemble, se soucier de l’autre, être là tout simplement pour chacun de ceux que nous croisons.
A un moment donné, j’ai souhaité que le monde s’arrête, car nous avons connu l’amour dans sa grande beauté ; j’ai vu les yeux, le regard de chacun que j’ai pu croiser, pleins de
reconnaissance, d’amour et d’empathie mutuelle.
La vie m’a appris que lorsque tu cultives la bonté et l’amour tu les récoltes un jour… mais un jour…
On ne sait pas quand ? peut être jamais ?? Mais je ne savais pas que nous allions récolter plus que ce que nous avions cultivé et en plus tout de suite. La vérité c’est que les migrants avaient cultivé pleins de gentillesses, des attentions, plein de délicatesses et de sourires… Avec tout le monde, une telle attitude ne pouvait donner qu’une très belle récolte. Un si bel adieu : je ne pourrai jamais l’oublier.
Beaucoup de nos frères n’avait jamais ressenti un tel sentiment d’empathie, de solidarité depuis qu’ils avaient quitté leur pays. Un migrant m’a dit : Si je devais vivre 100 ans, je ne ferai jamais un voyage comme celui-là.
C’est tellement beau de voir en l’autre un frère. Sa déférence est une richesse pour nous. La vie serait plus simple si nos cœurs étaient remplis de l’amour du prochain. Nos vies sont jalonnées de souffrance, bonheur, interrogation, contradiction, séparation, naissance mais aussi de découvertes et de rencontres qui s’ouvrent à nous et se mettent sur notre chemin tous les jours à condition d’avoir le cœur et les bras bien ouverts pour les accueillir.
Un grand MERCI car tous, nous avons œuvré pour que le vivre ensemble soit possible grâce à ce pèlerinage… nous allons continuer, même à petite échelle, dans nos quartiers, nos familles notre entourage, dans le bus, au marché…. de faire rayonner la charité, le dialogue et l’ouverture aux autres. C’est pour moi la clef principale qui permet un vivre ensemble …
J’Y CROIS
(traduit de l’arabe) Mariam Guerey