Des vies données : Sr Maria Pura

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Circulaire de Soeur Maria Pura

 

 

Sœur Inmaculada Celina ASENJO (Sœur Maria Pura)

 

Naissance : 9 janvier 1932 à Quintanilla (Leon) Espagne

 

Noviciat : 14 septembre 1948 à Lloret

 

Profession Temporaire : 12 mai 1951 à Lloret

 

Profession Perpétuelle : 13 août 1956 à Castres France

 

Décès : 30 juin 2015 à Barcelone. Espagne

 

 

Barcelone 21 octobre 2015-10-31

 

Chères sœurs,

 

Le jour des obsèques de Sœur Maria Pura, une sœur exprima un ‘SOUVENIR AFFECTUEUX » comme oraison funèbre. Maintenant nous voulons partager avec vous d’autres affectueux souvenirs.

 

UN SOUVENIR AFFECTUEUX

 

« Si le grain de blé ne meurt pas il reste infécond, mais s’il meurt il donne beaucoup de fruit »

 

Sœur Maria Pura a grandi sur une bonne terre, près de Notre Dame du Chemin. Et elle a marché avec elle, main dans la main pendant de longues années, plus de soixante dans la vie religieuse. Nul doute qu’elle reçu du bon grain de ses parents et de ses frères (deux religieux comme elle).

 

Mais ce que je veux relever c’est qu’elle-même a semé abondamment durant sa vie consacrée à l’éducation des enfants et des adolescents. Lorsqu’elle passait, elle laissait une trace. Sa droiture attirait, le don de l’autorité était inné chez elle. Beaucoup de professeurs la pleurent, aussi bien à Lloret qu’à Horta, avec elle on apprit l’orthographe sans fautes beaucoup de générations, et elles nous accompagnent dans la douleur de son départ. Celles qui ont eu la joie de marcher avec elle, nous avons senti son appui, sa foi rude, sans sensibleries, et sa droiture sereine face aux problèmes.

 

Elle a exercé des postes de responsabilité dans la Province et dans la Congrégation. Elle était Mère, on pouvait lui faire confiance. Jeune, elle aimait faire des farces et ne perdait jamais le calme à son âge mûr.

 

Elle a été pour toutes un modèle d’acceptation dans la maladie grave, qu’elle a supporté ces derniers temps. Sans se plaindre, sans amertume, elle savait que la fin était proche et elle y faisait front dans une profonde foi. Nous dirions qu’Émilie, par sa canonisation, lui transmettait sérénité dans la maladie. Et elle l’aura reconnue maintenant comme l’une de ses filles, et nous, nous rendons grâces aujourd’hui pour le don de la vie et pour la mort de Sœur Maria Pura.

 

Sor Maria Gloria (30 juin 2015)

 

Nous aurions beaucoup d’autres choses à dire de notre sœur avec qui nous avons vécu plus de soixante ans. Nous ne relevons que les aspects qui nous semblent se détacher.

 

La circulaire d’une sœur est une très petite mosaïque et, en plus, nous manquons de pièces. Jésus a complété déjà son image chez celle qui l’a suivi fidèlement sa vie durant.

 

 

 

Sœur Maria Pura fut

 

Une sœur qui savait remercier et demander pardon dans la foi :

 

Quelques jours avant sa mort elle nous laissait ce « testament spirituel » :

 

« AVANT QUE NOTRE SŒUR LA MORT ARRIVE » Je ne sais si elle arrivera bientôt ou si elle se retardera un peu ; si j’aurai ma tête au clair ou pas, mais dans le doute je préfère prendre de l’avance et ne pas laisser tant de dettes de reconnaissance, que jamais je ne pourrai payer en ce monde, quoique j’ai confiance de pouvoir le faire dans l’autre…

 

Merci à toute la communauté de Bonanova pour leur accueil, pour tant d’attentions et de soins, pour tant de choses…

 

Merci à chaque sœur en particulier, car je préfère ne pas citer de noms ni des faveurs ; toutes ont contribué, chacune comme elle a pu, à mon bien être et à ce que ma trop longue maladie ait été supportable. Je répète que Dieu me permettra là-haut, d’une certaine manière, pouvoir payer ce que je vous dois.

 

Pardon pour tout ce que, dans ma conduite a pu vous mal édifier.

 

Parfois la maladie, ou ce que nous sommes, fait ressortir : impatience, égoïsme… tant de choses qu’il nous semblait ne pas avoir, et on s’aperçoit que l’on n’a pas la force de maîtriser.

 

Je m’attache au « Notre Père »…

 

A toutes les sœurs que je sais ont prié pour moi, pour que je guérisse ou pour que je sache supporter la maladie… merci aussi. A toutes celles avec qui j’ai vécu, pardon pour tout ce qui en moi ou à cause de moi les a fait souffrir »

 

(Autographe, non signé) Sor Maria Pura

 

Et nous poursuivons à embellir la mosaïque de ce que fut la vie et l’œuvre de Sœur Maria Pura :

 

Une sœur d’œuvres pas seulement de paroles, quoiqu’elle en prononça aussi et bien. Beaucoup aujourd’hui en ont plein la bouche à répéter que nous devons travailler avec les laïcs d’égal à égal. Nous avons vu Sœur Maria Pura à genoux lavant le sol des classes avec les femmes de ménage « à égalité ».

 

Une sœur simple. Nous pourrions dire humble, sans manquer à la vérité. Jamais elle ne voulut dépasser, ni être protagoniste. Nous la voyons ainsi, recevant la Feuille de Laurier de la Mairie à l’occasion du 75ème Anniversaire du collège de Lloret, « embrassant » une image de Marie.

 

Une sœur à l’autorité innée. Elle exerça l’autorité en étant responsable dans les charges et dans le contact avec élèves et professeurs, elle inspirait confiance et respect. Son tempérament l’aidait dans cette façon de traiter.

 

Une sœur qui savait écouter. La souffrance des autres dans ses fréquentes visites à l’Hôpital Municipal. Elle écoutait les malades et le personnel soignant. Nos sœurs de Campohermoso pourraient en dire autant de sa façon d’accueillir les migrants pendant ses dernières années passées sur terre.

 

Une personne droite et austère. Lorsqu’il s’agissait d’elle, austère et pauvre, digne fille d’Émilie.

 

Une sœur éducatrice. A temps plein. Dans les rangs, les récréations, l’étude, les classes, dans les réunions avec les professeurs et avec les parents d’élèves. Ce talent d’éducatrice nous croyons qu’elle le tenait depuis le berceau. La dernière d’une fratrie de six, eu de bons modèles pour apprendre, à 20 ans elle était déjà responsable d’une classe et, en même temps, elle terminait ses études à Horta.

 

Une sœur patiente et accueillant la Volonté de Dieu.

 

L’or s’affine par le feu. Notre sœur s’est purifiée dans la maladie. Malgré la souffrance, nous ne l’avons jamais entendu se plaindre, jamais un « pourquoi moi ? » Unie à son Maître, nous l’avons vue prostrée dans son lit de douleur mais souriant et répétant merci au moindre service reçu des infirmières, médecins et sœurs.

 

Une sœur bleue. Sœur Maria Pura fut toujours une Sœur Bleue. Maintenant déjà sur l’autre rive, prés d’Émilie et de toutes celles qui l’ont précédée. D’après ce qu’elle nous dit dans ses dernières volontés elle veut continuer de l’être au ciel. Qu’elle intercède pour nous et qu’elle demande au Maître de la Moisson d’envoyer des ouvriers, que d’autres jeunes suivent son exemple.

 

 

Rosa Maria Bayo, ancienne élève et professeur du collège de Horta, nous partage le parfum d’un souvenir affectueux de celle qui fut sa maîtresse, sa confidente et amie, Sœur Maria Pura. Dans un regard enfantin elle nous offre un souvenir plein de candeur et, plus tard déjà adulte, l’admiration qu’elle sentait envers elle. Beaucoup d’anciennes élèves souscriraient ce témoignage.

 

« Aujourd’hui on me demande ce que je pourrais dire de Sœur Maria Pura… et je me pose une question moi-même… combien de pages seraient nécessaires pour « dire » quelqu’un comme elle ?

 

Oui, oui, c’est difficile de faire une synthèse et ne pas laisser, oublié dans un tiroir, certains de ses aspects.

 

J’étais si petite, que je l’ai vue la première fois, grande, mince, un visage clair, douce, transmettant toute la confiance dont un enfant de six ans avait besoin...

 

Je crois que je devrais monter au grenier, commencer à enlever des toiles d’araignées et entrer dans les canaux des souvenirs… « Elle m’apparaît comme la personne qui d’un sourire savait faire accomplir tout ce qu’elle croyait que les élèves devaient faire.

 

Une tranquillité posée, jamais un cri, elle était patiente. Je la vois dans un moment de désordre, là, plantée, jusqu’ à ce que les regards se croisent et que l’on comprenne… chacun doucement s’en allait là où il devait être.

 

Qu’est-ce que c’était un cri pour elle ? Une distorsion qu’un bon professeur ne devrait jamais faire sienne.

 

Une de ses qualités ? « Savoir écouter » Jamais elle ne s’imposait, elle écoutait et après elle donnait son point de vue bien argumenté, et après elle décidait, presque sûr qu’elle obtenait ce qu’elle avait en tête. En un mot, elle savait le faire.

 

Sans réclamer l’attention elle s’approchait des gens, elle ne voulait pas se faire remarquer… mais elle agissait, sans bruit…avec beaucoup de gentillesse ».

 

Le temps s’est chargé de changer de catégorie et la vie nous a offert l’Amitié, l’AMIE spéciale.

 

Le changement vers Lloret lui fut très coûteux, mais c’était le lot des sœurs. Temps de distances, de silences, et après vers le Sud, plus de distances et de silences, mais elle était toujours là, quand on se voyait on ne voyait pas le temps passer, il est vrai que pour les amis l’horloge ne marque pas le temps.

 

Cette année ultime a été dure, nos conversations comme toujours, nous parlions de tout, elle était contente d’avoir pu faire son travail, d’avoir rempli sa tâche elle disait qu’elle avait accompli sa vie.

 

Maintenant, déjà sur l’autre Rive, sûr qu’elle veillera pour ceux qui sommes encore en chemin »

 

Rosa Maria Bayo, ancienne élève de Horta.


Jamais nous ne finirons de tracer le profil d’une sœur avec autant de facettes. Dans cette mini biographie Nuria apporte une pièce à la mosaïque, peut-être la plus importante, après la sienne propre (le testament spirituel de Sœur Maria Pura) .Nuria a vécu de longs moments auprès de Sœur Maria Pura. Son témoignage ardent et fraternel ne pouvait manquer. Elle nous l’offre à tous et j’ose dire que nous le partageons toutes.

 

« Penser à Sœur Maria Pura, me la rappeler, faire mémoire de ce que j’ai vécu avec elle, c’est pour moi transmettre la joie d’avoir trouvé en vie une Sœur – Amie. Amie de Dieu et Amie des personnes.

 

Je peux dire que j’ai vécu avec elle deux étapes significatives dans ma vie. D’abord lorsque j’ai débuté ma vie religieuse à Horta, où elle me donna des valeurs propres de la Congrégation et sa passion pour Dieu et les pauvres, nous amenant à « Las Casas Baratas » (Maisons Bon Marché) et au « Carmelo » (quartier difficile). Maria Pura portait en elle un bonheur paradoxal. Fine, délicate, sensible, elle souriait, se taisait et quand elle sortait de ses silences, c’était une joie d’écouter ses commentaires et l’entendre dire, sans langue de bois, la vérité de ce qui se passait en étant témoin. Son cœur d’amie, fidèle, transmettait paix, sérénité et courage, aidait à vivre et créait la vie autour d’elle. Sa bonne humeur rendait facile ce qui était difficile. Elle avait une grande capacité de travail et aussi bien à Horta qu’à Lloret, elle donna une grande impulsion à l’éducation. Toujours fidèle aux valeurs humaines et évangéliques, elle répondait à cette dynamique vocationnelle en écoutant Dieu « où la voix du pauvre l’appelait » et c’est comme ça qu’elle arriva jusqu’à Campohermoso de tout son cœur.

 

Une autre étape c’est l’année dernière où nous rencontrions toutes les deux à Bonanova, à cause de notre santé fragilisée. Pour elle, maladie sans retour et la Grâce trouva toute sa force en elle. Elle s’éveillait toujours en présence de Dieu et la prière était la force de son cœur. Son abandon à Dieu, la clarté de ses idées et de sa situation furent l’expression de sa propre intégrité. Nous avons partagé, comme des sœurs et des amies, cette part de notre histoire voilée par la souffrance. Ensemble nous laissions Dieu être le maître de notre temps. Ce n’était pas facile. Le silence nous fortifiait, l’amitié nous maintenait et son intégrité nourrissait ma foi et mon espérance. Merci, Maria Pura.

 

Elle continuera d’encourager en nous le désir d’une vie centrée en Dieu et dans les pauvres à partir de la communauté. Son absence sera une présence qui, avec son témoignage, nous accompagnera toujours. Merci, Maria Pura d’avoir si pleinement vécu »

 

Nuria Bayo, Supérieure Générale

 

 

 

Nous voulons ajouter encore quelque pierre à la riche mosaïque qu’est cette circulaire sur la vie de Sœur Maria Pura. Nous pensons que le parfum de sa vie est arrivé très loin. Le témoignage de José Miguel en est un exemple. Nous ne pouvons pas suivre à la trace tous ceux qui l’ont connu et apprécié. Cependant nous partageons et rendons grâces à Dieu de l’avoir eue proche en vie et demandons au Seigneur d’achever son œuvre.

 

 

 

Sœur Maria Pura

 

J’ai connu Sœur Maria Pura il y a 28 ans, Mère Maria Pura à l’époque. J’eus la chance de l’avoir pour l’entretien d’embauche au collège de l’Immaculée Conception de Horta. Accueillante, ferme, ce sont les premiers mots qui me viennent à l’esprit quand je pense à cet entretien. C’était une personne de grande présence. Elle m’expliqua qu’il s’agissait d’une école féminine qui évoluait vers la coéducation et elle insista sur ce fait. Je sentais que ses élèves étaient dans sa tête et dans son cœur.

 

Nous avancions dans l’entretien et je lui expliquais que je n’avais pas encore les résultats d’une des matières présentée. Elle me demanda : « Vous croyez réussir ? » Je répondais oui et immédiatement elle dit : « Demain commence l’année scolaire, mais j’attendrais que vous ayez votre note définitive et que vous me la communiquiez » « Nous vous attendons ». Ce fut le premier geste de confiance de Sœur Maria Pura envers moi. Elle mit sa foi dans ma parole et depuis cet instant j’ai essayé d’être fidèle à ce qu’elle et les sœurs nous transmettaient. Chose que je n’aurais pu réaliser sans son exemple constant. Son professionnalisme, son humanité et sa force morale et spirituelle ont été quelques unes des caractéristiques qui émergeaient chez elle, rien que cela. Et le tout transmis avec un regard doux et pacifié, avec un geste aimable de grande dame.

 

Pendant ma première année de travail comme enseignant je me suis toujours senti soutenu par elle. Il n’y eut aucun problème, mais j’étais reconnaissant de savoir qu’elle était là, soutenant chaque personne, chaque élève, chaque professeur, les parents d’élèves et le personnel non enseignant. Elle était Mère Maria Pura et jamais mieux dit, la Mère. Elle, dans son humilité donnait cohésion à tout l’ensemble éducatif, sans que l’on ne s’en aperçoive.

 

Sa capacité de travail, à se donner, son esprit de conciliation, sa capacité d’écoute et de compréhension étaient un exemple pour chacun de nous.

 

Après un an de travail je partais faire mon service militaire. Mère Maria Pura encore m’offrit sa confiance. Elle me dit qu’on m’attendrait dès que j’aurais terminé mon service militaire et, pour plus d’assurance, elle me dit que ma fiancée, qui était aussi professeure, pourrait me remplacer. Et il en fut ainsi.

 

Au retour du service militaire, je repris mon poste sans aucun problème. C’était comme revenir à la maison. Avec Madre Maria Pura et avec les sœurs on se sentait accueilli, comme chez soi.

 

Quand je me suis marié, Sœur Maria Pura n’était plus à Horta. Elle avait était transférée au collège de l’Immaculée Conception de Lloret. C’est là-bas que nous sommes allés ma femme et moi lui présenter notre premier enfant.

 

Plus tard, je suis resté en contact avec elle au passage des ans ; Quand elle fut envoyée à Campohermoso, à son âge, elle restait volontaire, lutteuse infatigable pour le bien du prochain. Sans défaillir, elle s’est maintenue active luttant pour la dignité des plus faibles, les femmes étrangères qui arrivaient dans la zone des serres de Campohermoso, Almeria.

 

J’ai gardé le contact avec elle pendant 28 ans, que ce soit par lettre ou au téléphone, je lui souhaitais Bon Noël et j’attendais ses paroles car elles m’apportaient toujours quelque chose d’elle-même, un message de sagesse, un stimulant. Ma fidélité envers elle et ce qu’elle sut me transmettre m’a maintenu ferme, et ainsi se maintiendra son souvenir. Que Dieu la garde en sa Gloire.

 

Professeur José Miguel Camacho (Immaculée Conception-Horta).

 

 

 

Vos sœurs de la Province d’Europe- Espagne.